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28 février 2013

DotA : c’est quoi ? (3)

Classé dans : Article — admin @ 10 h 53 min

Dota 2 : Et toi, qu’est-ce que tu joues ?


De l’inutilité de la triade (suck it, China)

En tant que jeux multi-joueurs, les MMORPG ont inventé des rôles que l’on peut grosso modo résumer à une triade : tank / healer / dps. En organisant ainsi les différents joueurs et en leur donnant une fonction dans le groupe, on obtient une structure ayant une cohésion et chaque joueur a une tâche bien définie à remplir. Les MOBA ne sont pas très différents : alignant deux équipes de cinq joueurs, chacun va nécessairement avoir un rôle différent. Cependant, la « triade » consacrée du MMO ne leur convient pas et il est apparu nécessaire d’inventer de nouvelles catégories. Or les héros de DotA sont naturellement divisés en trois catégories, en fonction de leur caractéristique principale. Cette division n’est cependant pas pertinente quand il s’agit de choisir son héros et de composer une équipe et de nouveaux termes ont dû être inventés pour décrire les rôles dans DotA.


Manifeste pour la reconnaissance des héros Force intelligents

Sur l’écran permettant de choisir les héros, ceux-ci sont divisés en fonction de leur caractéristique principale. En effet, DotA est à l’origine une map créée via l’éditeur de Warcraft 3 et les héros en reprennent donc le fonctionnement : trois caractéristiques différentes, la Force, l’Agilité et l’Intelligence. La Force augmente le nombre de points de vie et la régénération passive de points de vie ; l’Agilité augmente l’armure et la vitesse d’attaque ; l’Intelligence augmente le mana et la régénération de mana. Chaque héros a une caractéristique dite « principale » qui augmente également ses dégâts (un héros Agilité gagnera donc vitesse d’attaque, armure et dégâts grâce à ses points d’Agilité, etc.). A chaque niveau, un héros gagne des points dans chaque caractéristique. Le nombre de points gagnés par niveau varie entièrement selon les héros.

Que conclure de ces premiers éléments ? D’abord, que chaque héros gagne donc des dégâts avec sa caractéristique principale et qu’il n’y a pas de caractéristique qui va naturellement taper « moins fort ». Ceci étant dit, dans un scénario purement fondé sur deux héros échangeant des coups, il apparaît nettement que le héros Agilité semble avantagé (puisqu’il augmente sa vitesse d’attaque ET les dégâts desdites attaques via la même caractéristique), ainsi que le héros Force dans une moindre mesure (puisqu’il va gagner des points de vie et donc être capable d’encaisser des dégâts tout en en infligeant. Par rapport à cela, le héros Intelligence semble désavantagé : sa caractéristique qui augmente les dégâts est liée à sa barre de mana, ce qui ne semble pas efficace dans la situation envisagée.

Il y a évidemment un « sauf que ». Les héros ont des sorts, très différents les uns des autres et des gains de stats très différents. Leur armure de départ et leur attaque de départ varie également. Il est donc difficile de faire des généralités. Certains héros Intelligence vont utiliser leur mana pour faire des dégâts via leur attaque (c’est le cas d’Outworld Destroyer) ; certains héros Agilité vont avoir un gain d’Agilité ridicule, etc.. Quand il s’agit de trouver la place d’un héros dans l’équipe, il n’est donc pas tant question de caractéristique principale que de sorts et de gains de statistiques.

Un véritable dilemme identitaire

On ne peut donc pas décrire les héros dans ce jeu via leur caractéristique principale ; c’est un élément de description mais cela ne permet pas de définir leur rôle. Les joueurs ont donc créé des rôles : la triade classique du MMO n’est pas spécialement pertinente ici puisqu’il n’y a que peu de héros ayant des soins, que ces soins font également des dégâts, pour la plupart et qu’ils ne définissent pas le rôle du héros. De la même manière, « tank » est plutôt une caractéristique qu’un rôle. Dans la plupart des cas, un héros « tank » va effectivement être résistant et difficile à tuer mais le rôle d’un tank est essentiellement de prendre l’aggro de l’adversaire et d’encaisser les coups pour son équipe ; un tel rôle n’existe pas vraiment dans DotA.

Pour cette raison, des termes ont été « inventés » : on parle dans DotA de « supports », de « carrys » ou encore de « gankers » et « init » (pour « initiateurs »). Le principe est qu’un support est un héros qui a des sorts le rendant efficace dès le début de partie et qui n’a pas réellement besoin d’items pour être efficace ; par opposition, un carry est un personnage peu utile en début de partie qui va avoir besoin de niveaux et d’items pour montrer son véritable potentiel. Le ganker est le rôle du héros de « mid-game » qui va beaucoup bouger et faire autant de kills que possible.

Cela amène une nécessaire précision : contrairement à LoL, les sorts ont des valeurs fixes, qui ne sont pas augmentés par les caractéristiques. Par conséquent, les héros ayant des sorts à dégâts (« nukes ») vont être surtout efficaces en début de partie et vont perdre en efficacité au fur et à mesure du temps par rapport aux héros qui se basent sur attaque de base (par opposition aux sorts qu’ils pourraient employer). La plupart des véritables carrys vont donc être des héros Force ou Agilité ayant les capacités qui vont bien.

Cette classification a été très longtemps été utilisée et l’est toujours dans une certaine mesure mais elle a prouvé ses limites : en effet, de nombreux héros ne rentrent pas dans une catégorie précise. Queen of Pain par exemple rentrerait plutôt dans la case « ganker », c’est du moins un héros joué solo car ayant besoin de beaucoup d’expérience pour être efficace ; avec un bon début de partie, elle peut cependant devenir un carry très viable. C’est d’ailleurs le cas de plusieurs héros classés à l’origine comme « gankers ». Des séparations ont donc été créées entre « semi-carry » « carry » ou « hard carry » ; certains héros vont pouvoir être joué en support ou en ganker, voire en  carry, etc.. En définitive, il s’est avéré difficile de classer une étiquette sur nombre de héros, dont le rôle varie selon le reste des héros présents et parfois selon le déroulement de la partie.


Savez-vous compter les rôles, à la mode à la mode

C’est d’Asie qu’est venu le moyen de classification que l’auteur de ces lignes pense le plus fonctionnel. Puisque les catégories précédentes sont variables et souvent ne marchent pas, autant inventer quelque chose de moins précis et plus fonctionnel. Cette méthode consiste à déterminer au début d’une partie l’ordre de farm (argent récupéré, notamment par le massacre en règle de pauvres creeps presque innocents). Très simplement, chacun des 5 héros se voit attribué un chiffre allant de 1 à 5. Le numéro 1 est celui qui a la priorité dans la répartition du farm, le numéro 5 est celui qui prendra le moins de farm, le numéro 2 a priorité sur le numéro 3, etc.. De cette manière,  on ne pense pas à placer les héros dans des larges catégories qui ne conviennent pas à la plupart mais on les pense simplement en fonction de leur place dans une composition d’équipe donnée. D’une partie à l’autre, Queen of Pain va donc pouvoir être jouée en 1 (c’est cependant plutôt rare) ou en 2, voire en 3 ; pas vraiment en 4 ou 5.

Que tirer de tout cela ? Quand vous lancez votre partie de DotA et que vous ne savez pas qui prendre, plutôt que de regarder la caractéristique principale du héros pour orienter votre choix, plutôt que de vous demander si votre héros est un « semi-carry » ou un « hard-carry », demandez-vous comment vous allez répartir l’argent de manière à ce que chaque héros puisse avoir un impact. Ce n’est évidemment pas le seul facteur : il faut essayer de prévoir les combinaisons possibles en lane (éviter par exemple de mettre deux héros càc sur la même lane), regarder les héros en face pour ne pas prendre un héros quand un de ses contres est en face, etc.. Mais c’est déjà une bonne manière d’y réfléchir, au premier abord.

Présentation d’une âme tourmentée

Pour finir ce petit article consacré aux rôles et à la classification (il y aurait sur le sujet bien plus à dire mais inutile de trop s’embrouiller dans un premier temps), jetons un œil à un héros versatile et plutôt intéressant dans le cadre de ce qui est discuté auparavant, car il peut occuper plusieurs rôles et plusieurs positions sur la chaîne du farm : j’ai nommé le sinistre Leshrac.

Derrière cette anagramme de Charles (Charles Xavier ou Charles X ? Les experts sont divisés) se cache un héros pourvu de quatre sorts actifs infligeant tous des dégâts.

Le premier, Split Earth, est un stun de zone qui se présente sous la forme d’un cercle dont le diamètre est ridiculement petit au niveau 1 et nettement plus correct lorsque l’on investit quelques points dans le sort. Le stun est efficace mais les temps de cast de Leshrac étant plutôt longs, il requiert généralement un autre héros pourvu de stun pour pouvoir le placer.

Le second sort, Diabolic Edict, est un PBAE (Player Based Area of Effect ; un AoE centré sur le héros) : une fois lancé, 32 explosions sont générées en 8 secondes autour de Leshrac, réparties aléatoirement entre les cibles, pour un total de dégâts très important (augmentant en fonction du nombre de points investis dans le sort). Concrètement, cela signifie que s’il n’y a qu’une personne à portée, celle-ci subira toutes les explosions, ce qui représente de très gros dégâts. C’est aussi un sort très efficace pour détruire rapidement des tours ennemies.

Le troisième sort, Lightning Storm, est une chaîne d’éclairs assez simple, qui inflige des dégâts intéressants mais qui a malheureusement un temps de cast décourageant (comme tous les sorts de Leshrac par ailleurs ; c’est son principal défaut).

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Le quatrième sort, Pulse Nova, est un autre PBAE que l’on peut activer / désactiver à loisir. Le lancer coûte du mana et il mange du mana pour chaque seconde passée active. En dépit des très importants dégâts infligés, c’est donc une pompe à mana.

Comptons bien : 4 sorts, 4 actifs, tous coûtant leur pesant de mana, spécialement l’ultime qui requiert du mana pour être maintenu actif. Conclusion ? Leshrac est très manavore. Ajoutons qu’il est de plus très fragile à cause d’un mauvais gain de Force (1,5 par niveau) et on a le tableau d’un héros qui semble requérir un paquet de farm pour être viable. Pourtant, Leshrac est un très bon support, fréquemment utilisé : en effet, simplement lancer deux ou trois de ses sorts lui permet d’avoir un gros impact sur un fight de début de partie ! Il peut également être joué en position 2 ou 3 (rarement 1) en lui laissant plus de marge pour avoir du farm et construire de gros items : un Leshrac résistant va infliger des dégâts absolument massifs au cours d’un teamfight.

Quelques indications rapides quant au build à suivre avec lui : on monte généralement deux de ses sorts au rang 4 avec de prendre l’ultime ou même le 3e sort. Le stun est toujours l’un de ces deux sorts, le deuxième dépend de la situation (mais le Diabolic Edict reste sans doute le plus efficace dans la plupart des cas). Au niveau 9, on monte un point dans le 3e sort et aux niveaux 10 et 11, deux points dans l’ultime. Cependant, c’est un build classique et contestable : le héros n’a pas vraiment un unique build à suivre.

Quant aux items, tout dépend du farm : joué en position 2 ou 3, une Bloodstone rapide peut le rendre très efficace (il s’agit d’un item conférant des stats et gagnant des charges lorsque le porteur tue des héros ennemis ou aide à en tuer, un peu comme l’Urn of Shadows mentionnée dans l’article sur les objets ; avoir beaucoup de charges réduit drastiquement le temps passé mort, notamment, et l’objet perd la moitié de ses charges lorsque le porteur meurt) ; il aura souvent besoin d’un Black King Bar (item qui confère une immunité totale à la magie pour quelques secondes) pour se déplacer librement dans un teamfight. Enfin, un Sheepstick augmentera sa capacité de nuisance en donnant un gros CC (Crowd Control) supplémentaire à son équipe. Joué en position 4 ou 5, viser les Arcane Boots et des Drums of Endurance (voire l’article précédent pour une brève description de leur effet), dans un premier temps ; à terme, si possible, un Black King Bar.

Pour discuter de l’article, c’est ici : http://www.raphp.fr/fofo/viewtopic.php?f=2&t=2134

20 février 2013

L’Europe face à la solidarité

Classé dans : Article — admin @ 12 h 52 min

Les seules réalités internationales, ce sont les nations. La Russie boira le communisme comme le buvard boit l’encre.
Charles De Gaulle

Quelques décennies plus tard, l’actualité semble donner à nouveau raison au Général. L’Union Européenne, qui n’a jamais cherché à devenir une nation, fait aujourd’hui face à de fortes revendications identitaires – le problème étant que celles-ci risquent aussi de « boire » quelques Etats en même temps qu’elles boivent le « rêve européen ».

A quoi fais-je référence ? Aux indépendantismes européens au sein de pays que l’on croyait pourtant solides, et qui émergent à la faveur des crises. Je ne traite pas ici des indépendantismes « historiques » que sont les autonomismes basque ou corse, mais de phénomènes qui trouvent un nouvel écho ces dernières années. Un peu partout se dessinent des communautés désireuses de s’émanciper des Etats en place et qui réclament leur indépendance : les Flamands en Belgique, les Catalans en Espagne, l’Ecosse au Royaume-Uni, l’Italie du Nord… Ces « régionalismes » ont au moins un point en commun : ils ne veulent pas payer pour les autres, c’est-à-dire le reste du pays. Car en effet, là où la crise passe, il est des régions qui ne veulent pas partager le magot : au moment d’aider la Wallonie Belge, la riche Flandre s’oppose, et réclame une décentralisation plus poussée de l’Etat Belge – quand ce n’est pas un passage à une confédération, voire la scission pure, pour que les Wallons se débrouillent avec leurs dettes. Quand l’Italie du Sud est dans une piètre situation, celle du Nord, puissante, s’agace de devoir l’aider. Et lorsqu’il s’agit de toucher aux ressources pétrolières de l’Ecosse, ses habitants réclament une Ecosse libre.

Les régionalismes en question portent en fait atteinte à l’idée de la solidarité nationale : au sein d’un peuple, la population la plus aisée va automatiquement payer de sa poche pour aider les plus mal en point, et cela fonctionne aussi bien pour les individus que pour les régions. Hors, les régions ne veulent plus, et pour s’opposer, s’en prennent à l’appartenance nationale : parce qu’ils seraient distincts, ces peuples-là n’auraient pas à payer pour d’autres peuples. Les Flamands seraient avant tout Flamands plutôt que Belges, et devraient donc aider d’abord les Flamands – les Wallons, quant à eux, peuvent toujours s’entraider entre eux -, car pour quelle raison un peuple devrait-il en aider automatiquement et sans condition un autre ? Si un Catalan est prêt à aider un chômeur Catalan, il n’a aucune envie d’aider un chômeur Andalou ou Galicien. Si tous ces petits « égoïsmes » régionaux pouvaient se dissimuler en période de croissance, ils se révèlent lorsqu’il s’agit de passer à la caisse. Chacun est prêt à aider les siens… mais pas forcément plus. C’est là qu’entrent en jeu les revendications indépendantistes : pour éviter le transfert de richesses, et pour échapper aux lois de l’État central, les régions riches vont s’appuyer sur des cultures et histoires locales préexistantes pour prétendre à une certaine spécificité identitaire, donc à un statut de nation, donc à une potentielle indépendance. Et si ces bases culturelles et historiques ne sont pas présentes ou insuffisantes, les régionalistes peuvent toujours les créer de toutes pièces, comme le fait la Ligue du Nord italienne avec la Padanie, ou les indépendantistes basques qui cherchent des racines inexistantes à ce qu’ils voudraient être une nation. C’est peut-être là un des grands risques de la crise de la zone euro : voir la dislocation des États actuels en plusieurs petits États « régionaux » – ou, dans le « meilleur » des cas, un affaiblissement des États centraux face à des régions déjà bien renforcées par leur richesse et le soutien de Bruxelles.

Il est au moins un pays qui échappe à ça : la France. Parce que la France est devenue, à l’issue d’un long travail, une nation une et indivisible, et qu’il ne viendrait jamais à l’esprit de quelque Limousin ou Bourguignon de se dire qu’il est d’abord de telle ou telle région plutôt que de France. Pour l’habitant de la région parisienne, il est normal de transférer des fonds depuis l’Île-de-France vers la région Rhône-Alpes si celle-ci ne s’en sort pas, sans même qu’on lui demande son avis. Il peut râler qu’on donne trop aux chômeurs fainéants, mais il n’en voudra pas spécifiquement au chômeur breton ou Lillois : c’est bien le chômeur français qu’il visera, d’où qu’il vienne sur le territoire. De son côté, le Flamand indépendantiste s’inquiètera avant tout que son argent ne tombe pas aux mains d’un chômeur Wallon… et jugera que ce transfert n’a pas à avoir lieu si cela s’avérait être le cas. Alors que des pays peuvent se diviser pour ces raisons – l’État Belge est déjà passé au stade d’État fédéral, et risque de finir en confédération -, personne en France n’envisage sérieusement de cesser de payer pour d’autres Français en fonction de leur région d’origine.

On retrouve le même mécanisme au niveau Européen : lorsque l’Europe du Sud, Grèce, Italie ou Espagne réclame des fonds, l’Europe du Nord, Allemagne en tête, freine des quatre fers. Chaque pays défend cyniquement ses intérêts et fait repousser le versement de chaque tranche d’aide tant qu’il n’a pas obtenu ce qu’il désire. Et l’opinion publique n’acceptera pas éternellement de jeter de l’argent par la fenêtre pour aider la Grèce : il n y a pas de raison à cela. Un Français aide, naturellement, depuis qu’il verse des impôts, les régions les plus pauvres de la France, via la redistribution automatique organisée par la solidarité nationale. Il ne pense pas à contester ce mécanisme. Un Allemand en revanche, ne voit pas trop bien pourquoi il continuerait à payer pour des Grecs : ils ne font pas partie de la même communauté.

Cette absence de communauté européenne risque d’être fatale à l’UE : si celle-ci avait pris le temps et s’était donné les moyens de forger une véritable nation européenne, alors peut-être la solidarité entre les États membres paraîtrait aller de soi, puisque leurs habitants se représenteraient faire partie d’une même communauté, aux intérêts communs. Sans cette idée, sans cette nation européenne, toutefois, il est impossible d’établir un régime politique à la fois démocratique et fonctionnel à terme : les plus riches refuseront de payer pour les plus pauvres, les régionalismes européens nous le rappellent.

Bien sûr, il n’est pas si simple de créer une nation. En France, cela s’est fait au prix de l’écrasement des particularismes locaux, de la lutte contre les patois, d’une instruction publique unifiée sur le territoire national, d’une forte centralisation et d’un réel manque de « tolérance » pour les « diversités » culturelles locales. Mais la nation – et donc aujourd’hui l’unité du territoire – était à ce prix, et ceux qui aujourd’hui voudraient proclamer un « peuple européen » devraient s’en souvenir : on ne fera pas un « peuple européen » sur la seule base que « l’Europe c’est la paix » ou « l’avenir ». Si la nation européenne est un jour construite, ce sera après un travail de longue haleine, et au coût de l’absorption ou de la suppression des cultures nationales qui l’auront précédé. Cette tâche n’a jamais été sérieusement envisagée – à dessein [1] – par les promoteurs de l’Union Européenne, et vu l’ampleur de la chose, il est peut-être trop tard. Il n’est d’ailleurs pas dit que la France s’en tire éternellement à bon compte : nos dirigeants de ces dernières décennies, girondins dans l’âme, n’ont eu de cesse de favoriser les régions au détriment des départements et de l’État central au gré des vagues de décentralisation. Face aux baronnies locales et aux États dans l’État qui dialoguent directement avec Bruxelles, le régionalisme pourrait bien finir par toucher la France…

[1] Il faut garder en tête l’origine politique de l’Union Européenne : c’est un projet construit à la fois contre l’Union Soviétique et contre les États, défendu essentiellement par des libéraux et des pacifistes, farouchement opposés à l’émergence d’un État central fort, et tout aussi décidés à briser les États nationaux. L’émergence d’une nation aurait constitué pour eux un dangereux prélude à celui d’un État central, et, dans l’autre sens, l’absence d’État rend  d’autant plus improbable le développement d’un sentiment national.

Pour discuter de l’article, c’est ici : http://raphp.fr/fofo/viewtopic.php?f=2&t=2172

16 février 2013

DotA : c’est quoi ? (2)

Classé dans : Article — admin @ 11 h 03 min

De l’art de sortir de chez soi bien couvert

De l’ordre des articles

Lecteur, on vous ment, on vous spolie. Il vous a été laissé entendre, que dis-je, l’auteur de ces lignes vous a affirmé que le prochain article de cette série serait consacré aux différents rôles dans DotA. Et bien non. Il faudra attendre le suivant (si ce n’est pas encore un mensonge). Dans un excès de mauvaise foi, il serait facile de prétendre qu’il en a été décidé après la publication du premier, dans un revers éditorial ayant laissé celui qui écrit dans l’impossibilité d’en faire autrement et d’échapper au tyrannique joug éditorial ne souhaitant que faire du clic au détriment du plaisir des lecteurs et de l’honneur de l’auteur. Ce serait cependant sacrément faux puisque ces lignes sont écrites alors que le premier article n’est ni publié, ni réellement finalisé et qu’au final, tout cela sert surtout à avoir quelque chose à écrire en intro.

Pour défendre ce revirement, l’article suivant incluait des parties évoquant des objets qui méritaient d’être explicitées avant, sans quoi elles auraient été peu claires. L’ironie est que cet article également va devoir faire référence à des notions qui ne seront expliquées que dans l’article suivant, le fameux article sur les rôles. Bref, il a été jugé préférable de faire passer cet article d’abord dans un souci de lisibilité.

Quant au fait de ne pas modifier l’annonce à la fin du premier article quand il y avait clairement le temps de le faire, sachez qu’il s’agit d’un revers éditorial décidé par le joug éditorial tyrannique décidé à décrédibiliser l’auteur pour le faire travailler encore plus. Pas crédible ? Non sérieusement, la flemme. Place au vif du sujet, donc.

Choisir son équipement

Après quelques clics, un petit chargement et des gazouillis d’oiseau pendant que vos partenaires (ou les bots) chargent, vous voici dans une partie de Dota 2 ! Vous sélectionnez votre héros, appuyez sur « Play » et un problème va se poser à vous. Gold : 603 ; six places dans l’inventaire. Qu’acheter ? Que faire ? Cet article va être divisé en deux parties : la première est consacrée aux objets (items) de départ et à ce que vous devriez acheter pour commencer la partie, et au cours grosso modo des 10 premières minutes. La suivante explorera quelques-uns des items les plus fréquemment achetés et qu’il est le plus utile de connaître – il y en a bien trop pour être réellement exhaustif.

Les shops

Eh, l’est mignon l’aut’ zouave mais où c’est’y qu’j’achète tout c’fatras moué ? La réponse peut sembler un peu évidente : à la fontaine, y a un gros bâtiment appelé « Shop », s’pas pour ça des fois ? Sauf que… Il n’y a pas que ce shop, et il ne contient pas tous les objets ! En effet, de chaque côté de la rivière, vous trouverez un Secret Shop et un Outpost ; le premier contient des objets rares et précieux, utiles pour fabriquer les objets les plus puissants ; le second contient une poignée d’items utiles et se situe juste à côté des lanes du haut et du bas, permettant aux héros d’acheter certains objets sans avoir à retourner à la base ni à utiliser le courrier. Il est difficile de faire une liste exhaustive de ce que vous pouvez trouver où, le meilleur professeur en la matière restant l’expérience.

Les starters
Indispensables :

Le courrier : pour 150 gold, cet item va sembler saugrenu pour la plupart des nouveaux joueurs qui ne penseront pas à l’utiliser. Cet item s’achète puis il suffit de cliquer une fois dessus dans l’inventaire pour le faire apparaître sur la map : c’est une unité, que n’importe quel membre de votre équipe peut contrôler et qui dispose d’un inventaire de six places, comme un héros. Son utilité ? Pouvoir acheter à distance des objets et les ramener directement jusqu’à vous sans avoir à faire un aller-retour à la base qui vous fera perdre du temps et donc de l’argent et de l’expérience. A terme, vous ne saurez plus jouer sans et il en faut absolument un par équipe.

Observer Ward : comme vous pourrez le constater, la carte est bien grisée et on n’y voit pas grand-chose, hormis notre base et les endroits où des héros et/ou unités alliés se trouvent. Une Observer Ward est un item qui s’achète par paire et qui place une petite sentinelle à l’endroit où vous le décidez, qui conférera une vision permanente sur la zone (même quand vous la quittez, donc). Knowledge is power, disait l’autre (se voyant répondre « Power is power » par une garce ne perdant rien pour attendre) et voir des endroits clés de la map vous permet, à vous et vos alliés de savoir quand l’adversaire tente de vous gank (c’est-à-dire se déplacer depuis une autre lane pour venir vous tuer), etc.. Pour le placement, le mieux reste ensuite de demander conseil à vos alliés et rapidement vous retiendrez quelques endroits intéressants. Il existe aussi un autre type de ward, les Sentries, qui permettent de voir les unités invisibles et les Wards de l’adversaire, mais leur utilisation est plus compliquée et elles n’ont rien de nécessaire dans un premier temps. Nous y reviendrons dans le futur.

Note : généralement, il est préférable de ne pas payer le courrier ET les Wards, ce qui vous coûterait un total de 300 gold, soit quasiment la moitié de votre pactole de départ. Le mieux reste de partager cette dépense entre deux héros pour ne pas trop vous pénaliser au départ.
Contre-note : ce conseil est valable pour commencer. En réalité, une fois qu’on joue entre personnes habituées et organisées, on laisse un héros payer le courrier et les Wards de départ pour que les autres n’aient pas à s’en soucier. Mais nous n’en sommes pas à ce point, n’est-ce pas ?

Consommables

Rester en lane (les chemins qu’empruntent les creeps) n’est pas forcément évident. Il y a les héros d’en face, de l’action, parfois des ganks (voir quelques lignes au-dessus) ; bref, vous risquez de perdre de la vie ou de lancer des sorts. Que faire alors ? Rester avec la moitié de vos points de vie et plus un gramme de mana en attendant que le temps passe ? Rentrer à la base ? La meilleure solution reste d’embarquer avec vous une poignée de consommables, ces objets à utiliser qui vous rendront une partie de vos points de vie ou de mana manquants !

Tango : pour 90 gold, vous avez un item avec trois charges qui se « consomme » en visant un arbre et en le « mangeant ». Cela vous donne une augmentation de la régénération de vie pour les 16 secondes à venir, correspondant à 115 points de vie récupérés sur la durée. Un total cumulé de 345 hp récupérés donc, mais surtout une régénération « passive », sur la durée et non-interrompue par les dégâts, ce qui en fait un bon item pour rester en lane malgré les tentatives de l’adversaire de vous en faire partir en vous attaquant méchamment. Conseil : en prendre un set, c’est cool, sur presque tous les héros, presque tout le temps. Une valeur sûre.
Healing Salve : 100 gold, une potion de soins tout ce qu’il y a de plus classique qui vous rend 400 hp en 10 secondes. L’effet est interrompu si vous êtes attaqué pendant les dix secondes. C’est donc essentiellement entre la Salve et le Tango une alternative : une régénération passive, qu’il est possible de garder en restant à portée des creeps, qui soigne moins et en plus longtemps ou un soin plus fort, sur une courte durée pour repartir à neuf quand vous êtes au plus mal. Moralité, les deux sont intéressants et la Salve est aussi une valeur sûre – qui peut par ailleurs être utilisée sur un allié. Conseil : en prendre une, en plus du set de Tango ; encore une fois, il y a quelques exceptions, des héros qui n’en ont pas vraiment besoin mais dans la majorité des cas c’est un bon investissement.
Clarity : parce qu’il n’y a pas que les points de vie dans la vie, la Clarity est une potion de mana qui coûte 50 gold et fonctionne comme la Healing Salve (elle est interrompue si on est attaqué pendant qu’elle était active). En revanche, elle ne rend que 100 points de mana sur une durée de 30 secondes, ce qui en fait un item exclusivement utile dans le tout début de partie et qui implique de s’éloigner un peu de l’action pour ne pas être interrompue. Malgré tout, c’est un item indispensable sur nombre de héros, car les sorts ont un coût en mana très important en début de partie ; en avoir une ou deux sur soi au début est un véritable plus.

Bottle : 600 gold pour un item assez special et intéressant qui implique l’exploitation des runes, buffs qui apparaissent toutes les deux minutes et qui seront évoqués plus en détail dans le futur. Pour résumer très brièvement, la Bottle est un item disposant de trois charges, chaque charge donnant un buff de quelques secondes augmentant considérablement la récupération de points de vie et de points de mana, qui s’interrompt si on est attaqué. Le buff n’est pas cumulable (on ne peut pas utiliser toutes les charges d’un coup, seulement à la suite). Et quand elle est vide ? Soit on retourne à la fontaine pour la recharger, soit on prend une de ces fameuses runes, qui y place le boost et la re-remplit. Tout cela n’est pas très clair et mériterait plus de place qu’on ne peut lui en accorder ici. C’est un item que vous verrez fréquemment mais presque uniquement pour le héros qui va aller sur la lane mid, et presque jamais en item de départ. Dans ce premier temps de découverte de DotA, oubliez la Bottle.

Items à stats :


Dans l’ordre : Iron Branch, Gauntlets of Strength, Slippers of agility, Mantle of Intelligence, Circlet.
Les caractéristiques seront l’objet de l’article suivant (oui, celui qui devait être avant ; je sais) mais grosso modo, résumons : il y a trois statistiques, la Force, l’Agilité et l’Intelligence qui donnent des bonus différents ; chaque héros a une caractéristique principale mais ça ne veut pas dire qu’il n’est intéressé que par cette caractéristique. Les objets listés ne sont pas les seuls à augmenter directement les caractéristiques, mais ce sont les seuls qui sont accessibles au départ et intéressants.
L’Iron Branch coûte 53 gold et donne +1 dans chaque caractéristique.
Les Gauntlets, Slippers et Mantle coûte 150 gold et donnent +3 dans leur caractéristique (Force, Agi ou Intelligence, donc).
Le Circlet coûte 185 gold et donne +2 dans chaque caractéristique.
Un rapide calcul montrera donc que 3 Iron Branches, pour 159 gold, donnent un total de +3 dans chaque caractéristique et qu’à l’évidence, c’est bien évidemment le meilleur item (on ne les surnomme pas les « GG branches » pour rien, ma foi). Sauf qu’évidemment, 3 Iron Branches, ça signifie occuper 3 places dans un inventaire de six places et qu’il faut donc jongler en fonction de la place et de l’argent disponible pour choisir les items que l’on choisit au départ. Le Circlet cependant est à mon avis à éviter, car coûtant trop cher pour ce qu’il apporte (3 Iron Branches reviennent moins cher, pour un point de plus dans chaque stat).
Ces « items à stats » de départ ne sont pas indispensables (leurs gains peuvent sembler bien médiocres, en début de partie) mais offrent un certain confort, d’autant qu’ils sont utilisés dans des items plus puissants, par la suite. Par exemple, le hasard qui fait bien les choses (ou les développeurs, allez savoir) fait que la Magic Wand, item sur lequel nous reviendront, utilise trois Iron Branches dans sa recette.

Les autres :

Quelling Blade : pour 225 gold, cette hachette vous offre un bonus en pourcentage de dégâts aux creeps et vous permet de couper des arbres – notamment pour se frayer un chemin. C’est un item intéressant si vous jouez un héros qui a cruellement besoin de prendre beaucoup de last hits au début (et donc de golds ; pour rappel, on gagne de l’or en donnant le dernier coup, le last hit, à un creep ennemi) mais l’argent investi dedans vous laisse généralement fragile. Utile sur certains héros, je le déconseillerais globalement dans un premier temps.

Stout Shield : 250 gold investis dans un item qui, faute de donner des stats, donne 60% de chance de bloquer une partie d’un coup (20 dégâts si le héros portant le Stout Shield est un càc, 10 s’il attaque à distance – on parlera par la suite de « ranged »). Sans entrer dans des calculs compliqués, il est à retenir que l’item peut être très efficace pour un càc, d’autant qu’il peut être amélioré par la suite, qu’il n’est en revanche pas très rentable pour un ranged.

C’est donc entre ces items là qu’il va falloir répartir vos 603 gold de départ, dans un premier temps (le Ring of Protection pourrait être également mentionné dans certains cas mais mieux vaut sans doute ne pas s’épancher sur trop de cas particuliers). Surtout, pas de Boots of Speed dans votre inventaire de départ ! Si chaque partie sera différente et que vous y ferez votre sélection, voici quelques propositions d’inventaires « classiques » :
Courier ou Ward + Tango + Healing Salve + Clarity*2 + Iron Branch*3
Avec un héros càc : Tango + Healing Salve + Clarity + Stout Shield +Iron Branch*2
Avec un ranged : Tango + Healing Salve + Slippers of agility*2 (changer selon la caractéristique principale du héros) + Iron Branch*2

Core Items

La notion de « core items » (en gros, les objets essentiels) est trompeuse : chaque héros va en réalité avoir des core items différents, en fonction de ses spécificités. Ceux qui vont être couverts ici vont en faire être les indispensables que vous retrouverez sur plus ou moins toutes les parties, quel que soit le héros. A commencer par les bottes, d’autant qu’en cette saison, ça gèle un peu les orteils sans.

Boots of Speed : les amis, vous avez sous les yeux vos futures meilleures amies, les bottes. Cette paire coûte 450 gold et est une paire de bottes toutes simples, qui ne donne qu’un bonus – cependant fort appréciable – de vitesse et qui sert de base aux autres types de bottes apportant chacun des bonus différents. Sur quasiment tous les héros, les Boots of Speed feront partie de vos premiers investissements, avec un autre item qui sera mentionné juste après la présentation des autres types de bottes.

Arcane Boots : pour un total de 1450 gold, ces bottes sont entièrement accessibles depuis l’Outpost (mentionné au début de l’article) et ont un effet que vos alliés – et vous-mêmes – trouveront fortement intéressant : elles rendent 135 points de mana à vous et aux alliés autour de vous, pour un cooldown de 55 secondes. En avoir une ou deux paire par équipe est vraiment un plus !

Power Treads : pour un total de 1400 gold, ces bottes augmentent encore un petit peu votre vitesse, donnent un bonus de vitesse d’attaque et un bonus de +8 à une caractéristique. A noter que l’on peut changer à tout moment et sans cooldown la caractéristique conférée par les Power Treads.

Phase Boots : 1350 gold au total pour des bottes qui augmentent un peu votre vitesse de base, par rapport aux Boots of Speed, confèrent un bonus à vos attaques et disposent d’un activable donnant un boost supplémentaire de vitesse pour quelques seconds et permettant, pendant ce court moment, de traverser les unités.

Tranquil Boots : ces bottes, qui coûtent 950 gold au total, sont les moins chères des bottes améliorées. Elles confèrent une très bonne vitesse de déplacement… A condition d’être hors combat ! Egalement, elles ont un effet activable ressemblant fortement à une Healing Salve, avec un cooldown de 40 secondes.

Boots of Travel : avec un total de 2450 gold, ce sont de loin les bottes les plus chères. Elles ne donnent qui plus est pas de bonus aux caractéristiques, ni aux dégâts. Cependant, elles remplacent avantageusement les tp scrolls (qui seront traités ensuite) en vous donnant la possibilité de vous téléporter sur n’importe quelle unité alliée sur la carte et donnent un boost de vitesse largement supérieur à toutes les autres bottes.

Et maintenant, c’est bien beau mais je choisis quoi ? La meilleure réponse serait sans doute « ça dépend » mais elle n’éclaire pas beaucoup. A retenir : les Arcane Boots (aussi appelées « mana boots ») sont vraiment un très bon investissement pour votre équipe. Autrement, les Power Treads sont un choix équilibré et sûr et les Tranquil Boots un bon choix quand les finances vont mal ; les Phase Boots ne sont pas forcément les plus intéressantes car elles vous laissent souvent fragile. Cela ne signifie pas que les Phase Boots sont un mauvais investissement mais que ce n’est pas forcément le choix idéal pour un débutant. Les Boots of Travel coûtent également bien trop cher dans ce cadre.
A retenir donc : Arcane Boots, Tranquil Boots ou Power Treads. Si vous ne savez vraiment pas, demandez à vos coéquipiers.

Magic Stick / Magic Wand : voici le meilleur item du jeu. Le Magic Stick, pour 200 gold, est un petit bijou qui gagne des charges à chaque fois qu’un ennemi à proximité lance un sort, jusqu’à un maximum de 10 charges. Il suffit de l’activer pour consommer toutes les charges dont il dispose : chaque charge rend 15 points de vie et 15 points de mana. Autant dire que c’est un item qui est utile à tout le monde et que l’auteur de ces lignes suggère vivement d’acheter dès que possible (il est disponible au fameux Outpost) sur n’importe quel héros. Il est difficile de s’épancher plus à l’écrit sur la merveilleuse utilité de la bête, la meilleure solution reste de le tester (et pour faire dans la réplique facile : c’est l’adopter). Qu’est-ce alors que le Magic Wand ? Simplement l’amélioration du Magic Stick ; il faut pour le construire un Magic Stick, une recette à 150 gold et… 3 Iron Branches ! Quand je vous disais que ces dernières constituaient un très bon investissement dans votre inventaire de départ. Le Magic Wand augmente le nombre de charges maximum à 15 et confère un bonus de +3 dans chaque caractéristique (bonus qui correspond aux 3 Iron Branches intégrées).

Town Portal Scroll : continuons à proférer des jugements peu nuancés avec cet item. Ne quittez jamais la base sans un TP scroll sur vous, à l’exception de votre premier départ de la base lorsque la partie commence. Il s’agit d’un item activable et qui disparaît après utilisation, qui coûte 75 mana et prend 3 secondes de canalisation ; une fois activé, il vous téléporte sur la structure alliée choisie. Il peut donc s’agir d’une de vos tours ou d’un bâtiment de votre base. Les Boots of Travel, mentionnées précédemment, permettent pour leur part de se téléporter sur n’importe quelle unité alliée (y compris les creeps, donc).

Ici s’achève la liste des indispensables. Par la suite vont vous être présentés une poignée d’items très utiles et que vous rencontrerez dans presque chaque partie, mais souvent à raison d’un par équipe plutôt qu’un par personne. C’est donc une liste totalement subjective et loin d’être exhaustive dont le but est simplement de présenter une poignée d’items qui simplement sont suffisamment utiles pour justifier le coup d’œil.

A fistful of items

Drums of Endurance : Pour un total de 1725 gold, cet item vous donne un joli bonus à toutes vos caractéristiques (+9) augmente quelque peu vos dégâts et surtout, confère une aura passive qui augmente la vitesse de déplacement et d’attaque aux unités alliées à proximité. En prime, un activable muni de 4 charges (chaque activation consommant une charge) qui confère un petit boost supplémentaire en vitesse de déplacement et d’attaque. Grosso modo un très bon item qui donne de bonnes stats et permet de donner un coup de pouce au reste de l’équipe. L’aura ne se cumule pas et en avoir plus d’un par équipe est donc quelque peu superflu.

Urn of Shadows : un utilitaire sympa et pas cher (875 gold) qui ne donne, au premier abord, que quelques stats intéressantes. Il devient réellement intéressant une fois que l’action commence : en effet, chaque mort de héros ennemi à proximité du porteur de l’Urne lui ajoute une charge (sauf si elle n’a aucune charge, auquel cas elle en reçoit deux). Donc plus on tue ou aide à tuer en portant l’item, plus on gagne de charges. Les charges peuvent être utilisées sur un héros ennemi ou allié. Sur un héros allié, la charge place un soin, pour un total de 400 hp en 8 secondes ; sur un héros ennemi, la charge place un debuff qui retire 150 hp en 8 secondes. Problème : si deux Urn of Shadows sont présentes dans la même équipe et qu’un ennemi meurt à portée, seule une charge sera attribuée, aléatoire, à l’une des deux. En bref, un excellent item mais dont il ne faut qu’un exemplaire par équipe.

Mekansm : derrière ce nom bizarre se cache un objet plutôt simple. Passivement, le Mekansm confère un bonus de régénération de HP aux alliés à proximité. Le Mekansm peut être activé pour rendre 250 HP et conférer un bonus de +2 à l’armure des alliés à proximité. En bref, un item quasi-indispensable. Le problème ? Le soin s’accompagne d’un debuff qui rend immunisé à un autre soin de Mekansm pour 25 secondes. Inutile donc d’en avoir plus d’un par équipe.

Pipe of Insight : l’item en lui-même a des propriétés intéressantes : 30% de résistance à la magie (donc de réduction des dégâts magiques infligés au porteur) et un joli bonus à la régénération de points de vie. Surtout, la Pipe of Insight contient un activable qui confère un bouclier à toutes les unités alliées à proximité pour une durée de 10 secondes : ce bouclier absorbe 400 dégâts magiques, augmentant drastiquement la durée de vie de votre équipe lors d’un affrontement ! Il y a évidemment des cas où l’équipe en face n’aura quasiment aucun dégât magique ; c’est cependant excessivement rare et la Pipe of Insight est réellement un must have (au même titre que le Mekansm) sur la très large majorité des parties. Tout comme le Mekansm, l’activable s’accompagne d’un debuff rendant immunisé à l’effet pour une durée quasi-égale à celle du cooldown. Bref, encore une fois, un item qu’il est inutile d’avoir en plusieurs exemplaires par équipe.

Il y aurait évidemment beaucoup à dire quant à quantité d’autres objets. Néanmoins, la place et le temps manquent, et l’objectif de cet article était de familiariser avec les starters et les items très importants à acquérir rapidement. Rappelons donc :
-    Jamais de bottes dans l’inventaire de départ
-    Toujours un TP scroll sur soi
-    Le Magic Stick est le meilleur item du jeu

Pour discuter de l’article, c’est ici : http://www.raphp.fr/fofo/viewtopic.php?f=2&t=2134

6 février 2013

Le tournant néo-libéral en France

Classé dans : Article — admin @ 19 h 29 min

Avant-propos

Cet article semblera vouloir prendre des airs d’article universitaire. C’est qu’à l’origine, il est un exposé (dont vous lisez une version améliorée) réalisé pour un cours de sciences politiques : la forme qui se veut assez neutre et dépassionnée, les notes de bas de page multiples, ne sont donc pas l’expression de quelque ambition pompeuse, mais bien les conditions dans lesquelles il devait être réalisé initialement, et quelque chose qu’il aurait été à mon sens dommage de supprimer. Je me suis dit que le sujet pouvait intéresser la communauté du forum – autant pour les débats entre anti et libéraux que pour donner à tous plus d’informations sur le sujet. Bonne lecture !

Introduction

Il est des citations qui symbolisent des politiques. Ainsi d’aucuns pouvaient-ils parler de « l’ardente obligation » du Plan [1], arguer que « c’est à l’Etat, aujourd’hui comme hier, qu’il incombe de construire la puissance nationale, laquelle, maintenant, dépend de l’économie… »[2], ou déclarer qu’ « entre les communistes et nous, il n y a rien »[3], et cela correspondait à leurs actes au pouvoir. D’autres ont pu, pareillement, défendre qu’il fallait « réconcilier la France avec l’entreprise »[4], « dégraisser le mammouth »[5], assurer qu’ « il ne faut pas tout attendre de l’Etat»[6], et promettre comme politique « la monnaie, la rigueur, l’Europe »[7], et appliquer ces idées-là. Ces citations, toutefois, témoignent de deux conceptions opposées de la politique économique, et hormis leur relatif éloignement temporel, on ne peut que constater l’apparente contradiction des paroles et du bord politique de ceux qui les prononcent : les premières citations, impliquant un rôle crucial de l’Etat dans la société, proviennent de personnalités classées à droite. Les secondes, aux implications fortement libérales, sont le fait d’individus qui se réclament de gauche. Que cela signifie-t-il ? A priori, une évolution idéologique des deux camps, car on peut retrouver dans les discours et les politiques de droite les plus récentes de semblables positions libérales. Mais ce changement ne va-t-il pas au-delà ? Ce ralliement au libéralisme n’a-t-il affecté, et n’est-il venu que des acteurs politiques eux-mêmes, ou a-t-il touché d’autres parts de la société ? Comment, pourquoi et sous quelle forme ? Cela s’est-il fait brutalement, comme avec l’arrivée de Margaret Thatcher au pouvoir au Royaume-Uni, ou alors sous la forme d’une lente évolution ? Autrement dit – et ce sera la question qui sous-tendra cet article – : comment s’effectue le tournant néo-libéral en France ? Pareille interrogation requiert de définir le néo-libéralisme, terme souvent employé pour recouvrir de nombreux courants libéraux (monétarisme, laisser-faire, ordo-libéralisme…). Nous l’utiliserons ici pour désigner le courant de pensée spécifiquement français, qui est apparu dans les années 30 et qui accorde une place à l’État pour fixer le cadre économique : plutôt que de disparaître ou de se restreindre à des compétences régaliennes, celui-ci doit, en instaurant une juridiction efficace, lutter contre l’apparition de monopoles et d’oligopoles, et permettre ainsi à la concurrence de jouer. Cette vision qui fait de l’État un acteur du système économique fait néanmoins attention à limiter ses actions : celui-ci n’est fondé que dans l’élaboration du cadre économique. Toute intervention dans le processus – redistribution, nationalisation, investissements, taxes… – est lourdement critiquée. Un système d’aides aux plus démunis peut néanmoins être envisagé, avec force limitations. On constate donc que le néo-libéralisme à la française n’est pas seulement une version avec quelques retouches cosmétiques du libéralisme traditionnel, pas plus qu’il n’est une sorte d’ « ultralibéralisme » qui prônerait la fin de l’État et de toute régulation[8],[9] – et on ne peut qu’insister sur l’importance de distinguer les deux, qui va bien au-delà d’une simple querelle sémantique[10]. Ce point établi, nous allons distinguer deux parties à notre article : une première pour étudier l’origine du tournant néo-libéral qu’est la crise de l’État-providence et les effets induits chez l’élite française ; et une seconde pour étudier l’évolution des politiques appliquées par les gouvernements, qui confirmeront peu à peu la place du néo-libéralisme dans la politique française.

I) Le ralliement des élites

Si le néo-libéralisme naît dans les années 30, en période de plein discrédit du laisser-faire traditionnel, il n’a pas beaucoup de temps pour s’imposer : le Colloque Walter Lippman, moment fondateur de cette doctrine, a lieu en 1938, après le Front Populaire et moins de deux ans avant l’instauration du régime de Vichy, qui posera les bases de la planification française et tentera de faire renaître le corporatisme. Suivront la Libération, les années 44-46 faites de nationalisations et d’interventionnisme, la IVème République qui développera l’État providence, et enfin la Vème République gaullienne, apogée du planisme français. Politiquement, les libéraux de toute sorte sont marginalisés : le système des trente glorieuses fonctionne et une économie dont l’État ne se mêlerait pas parait une idée grotesque pour l’essentiel de la population. Le néo-libéralisme survit intellectuellement dans quelques catégories (patronat, cercles intellectuels libéraux, une fraction de la droite…) mais sans pouvoir exister au-delà. La crise du modèle français dans les années 70 va leur permettre de revenir sur le devant de la scène.

A) La crise de l’État-providence

À partir des années 70, l’État-providence semble confronté à ses propres limites : retour d’un chômage conséquent, ralentissement de la croissance, creusement des déficits… Pierre Rosanvallon relève trois « crises » de l’État providence[11] : une crise financière (issue du ralentissement de la croissance, qui empêche l’État de financer son système de protection sociale), une crise d’efficacité (le système de protection sociale ne s’étant pas adapté au changement du monde) et une crise de légitimité induite par les deux précédentes (la crise économique fait que l’État prête le flanc aux critiques des libéraux). Plus largement, le modèle keynésien s’épuise : l’ouverture progressive des économies rend les politiques de relance moins efficace et impose aux entreprises comme aux États de s’adapter à des modèles étrangers. Pire : la « stagflation » (absence ou faiblesse de la croissance économique et inflation élevée) qui démarre durant ces années est un phénomène nouveau, contre lequel les mesures traditionnelles sont inefficaces. Enfin, la fin des accords de Bretton Woods signe la disparition de l’un des symboles majeurs du keynésianisme.

La crise d’un modèle économique n’est toutefois pas suffisante pour expliquer sa chute : comme l’énonce un adage des économistes, « it takes a model to kill a model ». C’est le néo-libéralisme qui va porter ce second coup.

B) La conversion des élites

Le néo-libéralisme français n’a guère connu de succès politique depuis sa fondation, mais il n’en a pas pour autant cessé d’agir : dès 1937 sont créées les éditions de Médicis, qui publient des ouvrages libéraux, antisocialistes ou anti-planistes, et joueront un grand rôle dans la diffusion des idées néo-libérales pendant l’après-guerre. Plus largement, après des années de luttes intellectuelles entre différents courants opposés à la planification (néo-capitalistes, partisans d’un laisser-faire plus radical, néo-libéraux français…), le néo-libéralisme sorti vainqueur, et acquit une certaine influence auprès du patronat au gré de la recomposition des syndicats patronaux.[12]

La seconde victoire des néo-libéraux eut lieu au sein même de l’administration française. Jusqu’aux années 70, celui-ci détenait la quasi-totalité de l’expertise économique, marquée par une grande hétérogénéité des idées de ses membres. Cherchant à se distinguer dans ce milieu par une excellence reconnue au niveau international, une partie des économistes d’État, notamment derrière Edmond Malinvaud, va se tourner vers les théories néo-libérales en vogue aux États-Unis[13], et s’assurer une hégémonie idéologique à l’intérieur des ministères. Ce monopole d’État de l’expertise influe également sur l’expertise des partis politiques ou des organisations syndicales : l’essentiel de leurs experts des politiques économiques ne peut que provenir de l’administration elle-même, le reste des experts potentiels, par exemple les professeurs d’université, étant maintenu loin des centres de décisions. Lorsque l’État s’ouvre à l’expertise civile – et ouvre à la société civile son expertise -, la conversion néo-libérale est déjà bien entamée. Même les plus réticents doivent faire face à la crise du keynésianisme et du modèle français, et donc employer les mêmes modèles, raisonner dans les mêmes termes que les néo-libéraux.[14] Avant le personnel politique, c’est donc d’abord le personnel administratif de l’État qui abandonne le « modèle français ».[15]

Une troisième victoire se fait auprès des intellectuels. Face à l’Union de la gauche, en pleine guerre froide, une partie de la France prend peur : l’État « socialo-communiste », comme l’État soviétique, serait promis à une vocation totalitaire. Dans les forums intellectuels, on trouve alors autant des militants libéraux qui voient depuis toujours dans le planisme un danger[16] que des « nouveaux philosophes », anciens militants d’extrême gauche tout aussi hostiles à l’État.

La quatrième victoire des néo-libéraux porte sur la construction européenne. Depuis les années 30 et la montée des idéologies socialistes ou planistes, les courants libéraux réfléchissent à un moyen d’affaiblir les États, menaces pour la libre entreprise, et élaborent les premières théories d’un marché européen. Ce sont eux qui pousseront la construction européenne de l’après-guerre, dans un double objectif de lutte contre le communisme et de libéralisation des marchés. Financés entre autres par la CIA, ils baseront la construction européenne sur le libre mouvement des capitaux, des hommes, la concurrence et la dépossession par les États de leurs moyens d’action économiques. La libéralisation induite par les traités ne fera toutefois pas effet tout de suite : le discours libéral est à peine audible dans les années 50, et les États resteront assez forts jusqu’à la fin des années 60 pour continuer à établir des politiques interventionnistes nationales malgré la pression extérieure. C’est lors des années 80 que s’opèrera un tournant décisif en faveur de l’UE, résultant à la fois de la signature de nouveaux traités, de la victoire des idées néolibérales et d’une nouvelle valorisation de la construction européenne.[17]

C’est dans ce contexte d’un modèle vieillissant et d’un climat intellectuel de plus en plus favorable au néo-libéralisme que va se dérouler le progressif ralliement d’une partie de la classe politique aux théories libérales.

II) Le ralliement des politiques

Si l’activité intellectuelle des néo-libéraux ne cesse pas durant la période 1940-1969, ceux-ci n’enregistrent que des succès modestes. Ainsi, s’ils obtiennent parfois le vote de telle ou telle loi, ils ne parviennent à aucune réforme de structure : la IVème République conserve son économie planifiée à la française, que la Vème République développera. Quant aux plus grandes victoires, que sont l’adhésion au marché commun ou le rapport du comité dit Armand-Rueff en 1959, celles-ci n’auront d’effet qu’à long terme : il faudra attendre les dernières années du pouvoir gaulliste pour que se fissure l’édifice planificateur, que le marché commun commence à prendre le pas sur les politiques nationales, et que les rapports favorables à une libéralisation de l’économie se multiplient[18]. Bref, si le libéralisme s’immisce aux moyens de « chevaux de Troie »[19], il ne gouverne pas encore : il faudra attendre le départ du Général De Gaulle pour noter la première réelle inflexion gouvernementale en direction du néo-libéralisme.

A) La présidence de Georges Pompidou (1969-1974)

Lorsque Georges Pompidou arrive au pouvoir, le modèle français est déjà fragilisé. Un ancien membre du Commissariat au Plan notait, en 1966 : « déjà, le Plan français a perdu de son emprise sur la majeure partie des secteurs productifs, emportés par le courant du marché élargi. Déjà ses programmes publics font l’objet d’analyses, parfois de révisions, annuelles et les esprits sont préoccupés d’équilibres de courte période. Si cette évolution se poursuivait, de quinquennale la planification deviendra annuelle, de générale sectorielle : elle cessera d’exister. »[20]

Si dans un premier temps le nouveau président semble marcher dans les pas de son prédécesseur, avec un premier ministre porté sur le social, les changements sont notables, et s’accroissent après le remplacement de Jacques Chaban-Delmas par Pierre Mesmer en 1972. Déjà en 1969, Georges Pompidou semble moins disposé à l’égard de l’interventionnisme : « Quand on a choisi le libéralisme international, il faut opter aussi pour le libéralisme intérieur. L’État doit donc diminuer son emprise sur l’économie au lieu de chercher perpétuellement à la diriger et à la contrôler. »[21]. Cela se traduit dans la pratique : rompant avec la politique du Général visant à concentrer les entreprises dans une seule structure puissante à économie d’échelle, il fait adopter la Loi Royer en 1973, qui défend le petit commerce aux dépens de grandes surfaces. Plus généralement, il préférera le maintien de plusieurs grandes entreprises sur un même marché, à leur fusion dans une seule. Outre son action en faveur de la construction européenne, grande force de transition libérale, il modifie également la gestion des entreprises publiques, qu’il presse de se tourner vers un mode de gestion similaire à celui du privé, c’est-à-dire cherchant la rentabilité. Enfin, l’État se replie quelque peu sur plusieurs grands projets, comme les autoroutes, en acceptant la présence de capitaux privés dans les grands projets publics.

Il ne faut toutefois pas exagérer la présidence de Georges Pompidou : si celui-ci a indéniablement rompu avec certains éléments économiques de la tradition gaulliste et instillé une première dose de libéralisme dans l’économie, la place de l’État demeure encore centrale lors de sa mort, et celui-ci aura conduit plusieurs grands projets publics d’industrialisation et de construction d’infrastructures. [22]

B) La présidence de Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981)

Le septennat de Valéry Giscard d’Estaing s’inscrit dans cette évolution. Si les débuts de son mandat sont surtout marqués par une importante relance keynésienne dirigée par Jacques Chirac, l’échec de celle-ci va entraîner la nomination de Raymond Barre au poste de premier ministre – un économiste ouvertement libéral.

La poursuite de la construction européenne contribue à davantage ouvrir les frontières, et donc à accroître l’importance de la concurrence internationale. La France ne parvenant pas à être compétitive sur tous les secteurs, le gouvernement décide de recentrer l’action de l’État sur des créneaux spécifiques. Ce n’est pas là l’abandon de toute politique étatique (l’État réalisera tout de même de nombreux investissements sur des projets centralisés et publics : le TGV, le nucléaire, le Minitel, les communications téléphoniques…), mais cela demeure un infléchissement certain qui laisse de nombreux secteurs lutter sur le marché international.

Raymond Barre entame une politique libérale : la lutte contre l’inflation prend le pas sur la politique du plein-emploi, la rigueur budgétaire limite les dépenses publiques et la libération des prix se substitue au contrôle de l’État.[23] Le plan est affaibli : il n’est plus contraignant, ni même, à partir du huitième plan (préparé en fin du mandat), chiffré. L’État-providence, enfin, est contesté : pesant trop lourd sur le coût du travail, il entraverait le marché. Si aucune mesure concrète n’est prise, l’émergence de ces critiques dans l’administration[24] et dans le discours politique pose les bases pour une remise en cause future du modèle français de solidarité[25].

Ainsi, le mandat de Valéry Giscard d’Estaing s’inscrit dans une progression du néo-libéralisme : des dirigeants se revendiquent désormais ouvertement libéraux, exercent le pouvoir et gouvernent en conséquence. Toutefois, il ne s’agit pas non plus d’une rupture brutale au niveau économique : le changement se fait sur des bases existant depuis de nombreuses années, le Plan n’est pas supprimé mais affaibli progressivement, et l’État continue et sa politique sociale, et le développement de grands projets. Si le libéralisme de Valéry Giscard d’Estaing n’est pas aussi radical que le monétarisme anglo-saxon, il n’en demeure pas moins plus proche du néo-libéralisme français que du planisme gaullien.

C) La présidence de François Mitterrand (1981-1995)

François Mitterrand se présente comme un socialiste, et les deux premières années de son mandat semblent marquer un recul du néo-libéralisme et un retour de l’État. En réalité, 1981 et 1982 ne furent que des parenthèses : l’échec des politiques du Parti Socialiste fut patent, et amena rapidement au « tournant de la rigueur » de 1983, qui consacra le néo-libéralisme. Cette évolution est le fruit de plusieurs processus : d’abord, les pressions économiques dues à la mondialisation. Marché ouvert, traités internationaux, serpent monétaire européen : autant de restrictions empêchant l’efficacité de toute politique « socialiste » avec lesquelles le gouvernement ne rompt pas. Ensuite, le changement idéologique au sein du PS : François Mitterrand avait veillé à empêcher l’émergence d’un groupe fort au sein du parti, qui aurait pu menacer sa position. Il avait donc marginalisé les marxistes du CERES et les plus à gauche des sociaux-démocrates, et promu les sociaux-libéraux et les démocrates-chrétiens, Jacques Delors, Michel Rocard ou Jacques Attali à la place des Jean-Pierre Chevènement. Lorsqu’il accéda au pouvoir, le Parti socialiste consistait plus en une « nébuleuse de clans »[26] qu’en un réel appareil partisan en mesure de gouverner. L’échec des politiques « de gauche » donne donc l’opportunité au versant libéral du parti de s’imposer, qui emploiera la construction européenne pour justifier le changement de politique – et par là, diminuera les possibilités pour l’État d’agir.

Alors, le gouvernement socialiste embrasse les politiques néo-libérales et la désinflation compétitive[27] : ses objectifs sont le recul de l’inflation, la réduction du déficit budgétaire, la signature du traité de Maastricht, la libération des prix, des baisses d’impôts[28]… La planification est encore diminuée : les plans contraignent moins, sont décentralisés, ne sont plus chiffrés. À partir de 1984, la finance est dérégulée, ce qui réduira d’autant plus les marges de manœuvre de la puissance publique[29]. La politique industrielle rejoint le « redéploiement » de Valéry Giscard d’Estaing, et se transforme en politique de l’emploi. De nouvelles visions du monde sont à l’honneur : on développe un discours guerrier dans l’économie. A la place du capitaine d’industrie, on promeut le « gagneur » qui ne prend pas de gants pour l’emporter ; et en cohérence avec cela, on s’en prend à celui qui ralentirait la société – fût-il fonctionnaire, syndicaliste, ou simplement moins motivé.

Politiquement, cette transformation n’affecte pas que le Parti Socialiste : lorsque celui-ci arrive au pouvoir, la droite, qui hésitait entre réminiscences gaullistes et libéralisme, s’allie contre la menace de « l’État totalitaire » et du « socialo-communisme », adoptant d’un bout à l’autre un vigoureux discours anti-Etat[30]. Dès 1984, Jacques Chirac, l’ancien premier ministre keynésien, défend Reagan. Friedrich Hayek reconnaît que « même en France », « le libéralisme classique est devenu la nouvelle pensée »[31]. Devant cette hégémonie idéologique que le PS est incapable d’affronter, les responsables socialistes se réfugient derrière l’image du gestionnaire compétent, capable de gérer une économie mondialisée et libéralisée.

La victoire de la droite en 1986 viendra entériner ce changement, avec le début des privatisations, qui seront ensuite poursuivies par les différents gouvernements, de droite comme socialistes, la libéralisation accrue de l’économie, développée sous Jacques Chirac comme sous Lionel Jospin, la fin d’un modèle social[32].

Ainsi, le passage au néo-libéralisme ne s’est pas effectué en une seule fois, au cours d’un tournant brutal comme ce fut le cas au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Le néo-libéralisme français, plus modéré, s’est traduit dans les politiques et dans les discours par une lente évolution, de Georges Pompidou à François Mitterrand, sur une base posée dès 1957-1958. Le « tournant de la rigueur » ne fit que consacrer un ralliement déjà opéré dans les esprits par les socialistes, qui rejoignirent les rangs des néo-libéraux aux côtés de la droite et de l’État.

Conclusion

Qui fut le traître ? A partir de quel moment les idées libérales sortirent-elles de la boîte de pandore patronale où elles étaient scellées pour partir opprimer les travailleurs, et qui en fut responsable ? Voilà une question qu’on retrouve dans tous les milieux antilibéraux. Chez la gauche radicale, on pestera sur Mitterrand, le « social-traître ». Chez les gaullistes, on critiquera vertement Valéry Giscard d’Estaing, le « libéral », ou, pour les plus intégristes, Georges Pompidou, l’affairiste qui aurait trahi le Général. La vérité est qu’il n y a pas eu de coupure nette, de moment curieux ou un gouvernement aurait subitement remisé au placard les trente ou quarante années précédentes de politique économique et de planification. Le tournant néo-libéral en France a bien eu lieu. Mais, tout comme le néo-libéralisme français fut une idéologie particulière, le tournant français fut réalisé de façon spécifique : ce ne fut pas une rupture brusque, mais un changement progressif sur près d’une vingtaine d’années. Les néo-libéraux, qui veillaient à maintenir une activité intellectuelle, ont profité de la crise connue par l’État-providence pour présenter leur contre-modèle, auquel se sont d’abord ralliées les élites intellectuelles, économiques et administratives, avant que ne s’y rallient peu à peu les élites politiques. Du départ du Général De Gaulle à l’élection de François Mitterrand a lieu un processus où les planificateurs quittent peu à peu le pouvoir et où la pression engendrée par l’appartenance à l’ancêtre de l’Union Européen force ceux qui restent à se placer dans un cadre néo-libéral. Une première inflexion a lieu sous Georges Pompidou, qui sera suivi du mandat plus libéral de Valéry Giscard d’Estaing. Lorsque le Parti Socialiste arrive au pouvoir en 1981, il n’a pas le choix : le modèle keynésien apparait épuisé, la construction européenne condamne le socialisme, les élites socialistes elles-mêmes n’y croient plus, et l’État comme la droite sont dirigés par des convertis au néo-libéralisme. Plus qu’un « tournant » de 1983, il faut peut-être plutôt envisager 1981 et 1982 comme une parenthèse dans l’établissement d’un État néo-libéral, tout comme le gouvernement Daladier de 1938 avait pu sembler une parenthèse libérale dans la construction d’un État planificateur.

Bibliographie

DARDOT Pierre et LAVAL Christian, « La nature du néolibéralisme : un enjeu théorique et politique pour la gauche », Mouvements, 2007/2 n° 50, p. 108-117.

DENORD François, « Aux origines du néo-libéralisme en France, Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938 », Le Mouvement Social, 2001/2 no 195, p. 9-34.

DENORD François, « La conversion au néo-libéralisme. Droite et libéralisme économique dans les années 1980 », Mouvements, 2004/5 no35, p. 17-23.

DENORD François, « Le prophète, le pèlerin et le missionnaire », in : Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 145, décembre 2002, La circulation internationale des idées, pp. 9-20

DENORD François, « Les idéologies économiques du patronat français au 20e siècle », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2012/2 N° 114, p. 171-182

DENORD François, « Néo-libéralisme et « économie sociale de marché » : les origines intellectuelles de la politique européenne de la concurrence (1930-1950) », Histoire, économie & société, 2008/1 27e année, p. 23-33.

DENORD François, Néo-libéralisme version française, Histoire d’une idéologie politique, Paris, Demopolis, 2007

DREYFUS Françoise, « La révision générale des politiques publiques, une conception néolibérale du rôle de l’État ? », Revue française d’administration publique, n°4, 2010, pp. 857-864

GAUCHON Pascal, Le modèle français depuis 1945, Paris, PUF, 2011 (2002)

JOBERT Bruno et THERET Bruno, « France, la consécration républicaine du néo-libéralisme », in JOBERT Bruno (dir.), Le tournant néo-libéral en Europe, Idées et recettes dans les pratiques gouvernementales, Paris, L’Harmattan, 1994, pp. 21-85

JOHANN Michel, « Peut-on parler d’un tournant néo-libéral en France ? », Sens Public, mai 2008 (http://www.sens-public.org/article/php3?id_article=577)

MASSET-DENEVRE Emmanuel, Le tournant néo-libéral de la politique macro-économique française : une explication en termes d’évolution de la contrainte extérieure, EPEH, 1999.

ROSANVALLON Pierre, La crise de l’État providence, Paris, Seuil, 1992 (1981)

ROUBAN Luc, « L’État à l’épreuve du libéralisme : les entourages du pouvoir exécutif de 1974 à 2012 », Revue française d’administration publique, 2012/2 n° 142, p. 467-490.

Deux mots sur la bibliographie (pour le lecteur qui voudrait chercher un peu sur le sujet et pour l’Adrial qui sommeille en chacun de nous)

Un premier auteur sort du lot – et c’est visible par sa présence dans les références -, c’est François Denord. C’est un auteur reconnu, qui a essentiellement travaillé sur les origines du néo-libéralisme français et sa place dans les années 30-60 et qui utilise beaucoup d’archives inédites. Je recommande son livre Néo-libéralisme version française, qui est clair et plein d’informations – mais vous pouvez aussi lire ses différents articles qui pour l’essentiel retracent l’évolution du néo-libéralisme sur cette période. Une limite toutefois : son propos, qui aborde le sujet sous un angle sociologique, se concentre essentiellement sur ladite période. Il est rare qu’il développe ce qui se déroule durant les années 70 et ultérieures, ou alors au niveau idéologique à droite – vous trouverez bien peu d’analyses sur la présidence Giscard d’Estaing ou le « tournant de la rigueur » de 1983. Enfin, l’auteur est lui-même antilibéral, ce qui ne se ressent pas vraiment dans son propos à mes yeux, mais semble énerver les libéraux à la lecture.

Un article qui mérite d’être mentionné est le chapitre de Bruno Jobert et Bruno Théret dans Le tournant néo-libéral en Europe. Une soixantaine de pages synthétiques qui couvrent la transition néo-libérale en France, en s’intéressant pas mal à l’administration et à l’expertise publique, une analyse curieusement absente des textes de Denord.

Une autre recommandation est à faire à propos du livre de Pascal Gauchon, Le modèle français depuis 1945. C’est un petit ouvrage, très simple et accessible, très synthétique, qui ne parle pas vraiment de libéralisme, et qui me semble bien présenter son sujet.

Un dernier livre, sur lequel je préciserai quelques points, est celui de Pierre Rosanvallon, La crise de l’État-providence. Rosanvallon est un militant politique, et son propos s’en ressent. Le livre est divisé en trois parties : une analyse de la crise que connaîtrait l’État (le livre date de 1981, c’est donc un retour sur les dix années écoulées), une histoire résumée du libéralisme et de ses penseurs (avant le tournant de la rigueur et la mainmise durable de Reagan et Thatcher sur leurs pays donc) et les solutions de Rosanvallon pour sortir de la crise (et là le propos quitte le scientifique pour devenir strictement politique). Rosanvallon est de centre-gauche et semble déterminé à poser des limites à l’État – en bon social-démocrate, il lui préfère au-delà d’une certaine limite la société civile. C’est par cette analyse (du « trop d’État », « trop d’attente de l’État ») qu’il aborde donc sa première et troisième partie. Si ça n’est pas gênant dans la troisième – qu’on peut apprécier ou balayer d’un revers de la main sans grands problèmes puisqu’elle se veut moins une étude objective qu’une proposition politique -, cela peut l’être plus dans la première. C’est donc le livre le plus engagé de la liste, ce qui n’est pas nécessairement un mal, mais qu’il vaut mieux garder à l’esprit. Plus gênant : l’analyse de la crise de l’État à proprement parler ne couvre qu’un tiers du livre.

La discussion continue ici : http://www.raphp.fr/fofo/viewtopic.php?f=2&t=2148

Références et notes de bas de page

[1] DE GAULLE Charles, discours du 8 mai 1961

[2] DE GAULLE Charles, « Le salut (1944-1946) » in Mémoires de guerre, Plon, Paris, 1999, page 122

[3] Citation d’André Malraux, futur ministre de la culture du Général de Gaulle, en 1949

[4] Citation de Ségolène Royal, dans une interview à Paris Match, le 15 février 2007, de Nicolas Sarkozy, lors de sa visite à l’usine d’Alstom le 17 mars 2009 ; également attribuée à François Mitterrand durant la campagne électorale de 1986

[5] Citation de Claude Allègre, ministre de l’Education, dans un article du journal Le Monde le 24 juin 1997

[6] Citation de Lionel Jospin lors d’une visite aux usines Michelin le 16 septembre 1999

[7] HOLLANDE François et MOSCOVICI Pierre, L’heure des choix : pour une économie politique, 1991, page 376

[8]« Entre ne rien faire et administrer tout, l’État libéral prend le parti de tout surveiller en disant le droit, en faisant respecter par tous la loi égale pour tous. Il ne prétend pas se substituer au jeu régulateur de l’équilibre économique, mais il vise à dégripper, au nom de l’intérêt collectif, les facteurs naturels de l’équilibre. […] En résumé, le libéralisme constructeur admet l’ingérence juridique de l’État pour protéger la libre compétition qui seule permet de sélectionner les valeurs […]. » Louis Rougier, cité par STEINER Yves in « Louis Rougier et la Mont Pèlerin Society : une contribution en demi-teinte », Cahiers d’épistémologie du département de philosophie, Université du Québec, n°2005-10, p. 38-39.

[9] « Être [néo-]libéral, ce n’est pas comme le manchestérien, laisser les voitures circuler dans tous les sens, suivant leur bon plaisir, d’où résulteraient des encombrements et des accidents incessants ; ce n’est pas, comme le planiste, fixer à chaque voiture son heure de sortie et son itinéraire ; c’est imposer un Code de la route, tout en admettant qu’il n’est pas forcément le même au temps des transports accéléré qu’au temps des diligences. » ROUGIER Louis in « Travaux du Centre international d’études pour la rénovation du libéralisme », Le Colloque Lippmann, Paris, Librarie de Médicis, 1939, page 16.

[10] « La confusion entre libéralisme et état de nature, entre néolibéralisme et « jungle darwinienne », permet encore aujourd’hui de légitimer, dans le sillage du SPD allemand, un ralliement des gauches gouvernementales européennes à la forme contemporaine dominante du libéralisme, c’est-à-dire à un « management conscient » du marché, selon la formule employée par Walter Lippmann dans les années 1930. L’idée que tout encadrement du marché serait en soit la marque d’un progrès est en réalité l’alibi d’un renoncement à pratiquer une politique non-libérale » DARDOT Pierre et LAVAL Christian, « La nature du néolibéralisme : un enjeu théorique et politique pour la gauche », Mouvements, 2007/2 n°50, p. 116

[11] ROSANVALLON Pierre, La crise de l’Etat-providence, Paris, Seuil, 1992 (1981)

[12] Pour l’évolution idéologique du patronat, voir DENORD François, « Les idéologies économiques du patronat français au 20ème siècle », Vingtième Siècle, Revue d’histoire 2/2012 (N°114), p. 171-182.

[13] Qui n’est pas le même néo-libéralisme qu’en France, mais qui ouvre autant, sinon plus, la voie à une remise en question de l’intervention de l’État et à une revalorisation du marché.

[14] Pour l’évolution idéologique de l’expertise publique, voir JOBERT Bruno et THERET Bruno « France : la consécration républicaine du néo-libéralisme », in JOBERT Bruno (dir.), Le tournant néo-libéral en Europe, Idées et recettes dans les pratiques gouvernementales, Paris, L’Harmattan, 1994, pp. 21-85

[15] Si l’influence de cette ouverture sur l’État reste à déterminer, il faut rappeler qu’elle n’a pas eu lieu que dans un sens, et que le personnel et l’expertise privé ont pu à leur tour participer à la définition des politiques publiques. Ainsi, dans une étude sur l’évolution sociologique des proches du pouvoir exécutif depuis 1974, Luc Rouban note « Cependant, les personnels qui accèdent aux entourages du pouvoir exécutif ont changé. Très souvent, ils ont acquis une expérience dans les entreprises privées et ont reçu une formation dans les écoles de commerce. Leur destin professionnel les conduit fréquemment vers les entreprises. Ils s’engagent en politique bien plus souvent qu’autrefois, mais fréquentent beaucoup moins les cabinets ministériels. » ROUBAN Luc, « L’État à l’épreuve du libéralisme : les entourages du pouvoir exécutif de 1974 à 2012 », Revue française d’administration publique, 2012/2 n°142, page 490.

[16] « L’Union de la gauche et son Programme commun suscitent un ensemble de mobilisations sectorielles en faveur du libéralisme, orchestrées par des groupes militants situés à la jonction entre univers patronal, intellectuel et politique. Bien qu’ils n’aient pu empêcher la défaite de 1981, ils ont joué un rôle décisif dans l’acclimatation des idées libérales à droite. » DENORD François, « La conversion au néo-libéralisme, Droite et libéralisme économique dans les années 1980 », Mouvements, 2004/5 n°35, p. 17

[17] Sur les racines néo-libérales (et ordo-libérales) de la construction européenne, on peut lire DENORD François et SCHWARTZ Antoine, L’Europe sociale n’aura pas lieu, Raisons d’agir, 2009, 138 p.

[18] Après le rapport Armand-Rueff de 1959, il faudra attendre le rapport Nora de 1967, le rapport Montjoie de 1968, et le rapport Marjolin-Sadrin-Wormser de 1969 pour que s’étoffe la liste des rapports en faveur du libéralisme.

[19] « La stratégie de Hayek est métapolitique : il s’agit de maintenir l’existence d’un courant néo-libéral, d’entourer progressivement l’adversaire comme au jeu de go, en attendant que les conditions historiques et institutionnelles permettent l’unification des élites économiques et politiques autour de ses thématiques », DENORD François, « Le prophète, le pèlerin et le missionnaire », in : Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 145, décembre 2002, La circulation internationale des idées, page 15

[20] BAUCHET Pierre, La planification française. Vingt ans d’expérience, Paris, Editions du Seuils, 1966, page 337

[21] Georges Pompidou, cité in KNAPP Andrew, Le gaullisme après De Gaulle, Paris, Editions du seuil, 1994, page 270

[22] Il est souvent cité à propos de la présidence Pompidou la « loi de 1973 » qui aurait interdit à l’État d’emprunter auprès de la Banque Centrale, laissant la puissance publique aux mains des banquiers privés, ce qui n’est en fait pas le cas. Pour plus d’explications, on peut s’intéresser à cet article (assez technique) réalisé par deux citoyens : http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/la-loi-de-1973-accusee-a-tort-d-112199

[23] « Le plan Barre marque une première rupture avec le passé keynésien : la stabilité monétaire passe avant le plein-emploi. La deuxième rupture est le refus d’une politique conjoncturelle et discrétionnaire et la préférence pour une action continue et de longue haleine. La troisième rupture est le désir de s’attaquer aux causes structurelles de l’inflation et de restaurer les mécanismes du marché concurrentiel plutôt que de multiplier les interventions de l’État. », GARELLO Jacques, « Le libéralisme depuis cinq ans », Liberté économique et progrès social, n°26, avril-mai-juin 1977, pp. 23-24

[24] Rapport produit par des élèves de l’ENA de la promotion Guernica dans la Revue française des affaires sociales, numéro spécial « perspectives de la sécurité sociale », juillet-septembre 1976

[25] « Avec le gouvernement Barre commence à se mettre en place un processus promis à un avenir durable, hormis la parenthèse mitterrandienne de 1981-1983 : le transfert aux autres domaines de politiques publiques, surtout les politiques sociales, du référentiel néo-libéral de marché. » JOHANN Michel, « Peut-on parler d’un tournant néo-libéral en France ? », Sens Public, mai 2008, page 11. (http://www.sens-public.org/article/php3?id_article=577)

[26] JOBERT Bruno, (dir.), Op cit., page 50

[27] « L’ouverture sonne le glas de la stratégie de croissance forte qui avait prévalu de 1981 à 1983. (…) Cette politique de dévaluation compétitive est remplacée par la désinflation compétitive. » GAUCHON Pascal, Le modèle français depuis 1945, Paris, PUF, 2002, page 91

[28] Ainsi, l’impôt sur les sociétés passe par exemple de 50% à 33% de 1985 à 1993.

[29] Pour une étude de l’effet de la libéralisation financière sur les marges de manœuvres des politiques publiques, voir MASSET-DENEVRE Emmanuel, Le tournant néo-libéral de la politique macro-économique française : une explication en termes d’évolution de la contrainte extérieure, EPEH, 1999.

[30] DENORD François, « Un libéralisme réactionnel », Néo-libéralisme version française. Histoire d’une idéologie politique, Paris, Demopolis, 2007, pages 293-302

[31] Le Figaro Magazine, 10 mars 1984

[32] Il ne s’agit pas seulement de la restriction de l’Etat-providence, mais également de la gestion des affaires publiques, désormais gérées avec les méthodes du privé. Voir : DREYFUS Françoise, « La révision générale des politiques publiques, une conception néolibérale du rôle de l’État ? », Revue française de l’administration publique, n°4, 2010, p. 857-864

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